Le « Bip », une route accusée de mettre en danger la santé de milliers d’enfants

Le « Boulevard Intercommunal du Parisis » (« Bip »), est-il un projet de route écocide, qui mettra en danger la santé de milliers d’enfants et détruira une centaine d’hectares, ou au contraire un projet utile, qui permettra en décongestionnant le val d’Oise, de faire baisser la pollution et surtout de faciliter la vie des gens ? Telles sont en substance les positions des anti et pro Bip, une « deux fois deux voies » de la taille d’une autoroute entre la A1 et la A15, dont le projet de construction a été relancé à la fin de l’année dernière par le département du Val-d’Oise.

L’expression de « serpent de mer » paraît trop faible pour qualifier le « Bip », dont le premier tracé date des années 1930. Depuis cette date, plusieurs parties de cette route rapide ont été réalisées, mais le dernier tronçon avait été annulé en justice et ensuite renvoyé devant la Cour d’appel, donnant quelques répits à ses opposants. Le département du Val-d’Oise a relancé la polémique en votant fin octobre un crédit d’étude de 7 millions d’euros, et la région Ile-de-France a apporté son soutien à la section Est de 5,5 km entre Groslay et Bonneuil-en-France, en l’inscrivant en juin dans son schéma directeur (Sdrif-e).

« Aucune porte n’est fermée »

« Aucune étude ne démontre l’utilité de ce projet », critiquent plusieurs associations, qui organisent une marche le 7 octobre pour en demander l’abandon. Selon ces associations, parmi lesquelles France Nature Environnement Ile-de-France et le collectif Vivre sans BIP, « une centaine d’hectares d’espaces naturels et agricoles » seront détruits à cause de ce projet, qui menace la santé « de 10.000 enfants dont la quarantaine d’établissements scolaires est située le long du tracé ». « Ce poumon vert exceptionnel en Ile-de-France – préservé de l’urbanisation grâce à l’existence de ce projet – doit être protégé comme un îlot de fraîcheur essentiel pour les habitants », concluent les associations.

Selon Audrey Boehly, du collectif Vivre sans Bip, 5.000 élèves de Sarcelles seraient à 50 ou 100 m de la route, la ville étant celle avec le plus d’élèves touchés. Autre exemple, l’école primaire des Glaisières à Groslay se retrouverait à moins de 100 m. Selon le ministère de la santé, les enfants sont les plus impactés par la pollution atmosphérique, avec des impacts négatifs aux abords des routes les plus fréquentées, comme un risque plus élevé de leucémie. Les enfants qui vivent à moins de 100 m de routes importantes ont aussi trois fois plus de risques de développer de l’asthme, selon une étude du Journal of Allergy and Clinical Immunology. Le bruit des transports est par ailleurs associé à des problèmes d’apprentissage et de performance scolaire à l’école, alors que les habitants qui vivent sur la zone du tracé du Bip sont déjà situés dans une zone de bruit, proche de l’aéroport de Roissy..

Le tracé du Bip avec les écoles à moins de 100 m, 2050 m et 500 m.
Le tracé du Bip avec les écoles à moins de 100 m, 2050 m et 500 m. – Collectif Vivre sans Bip

En face, la région Ile-de-France indique défendre uniquement la partie Est du tronçon, où les oppositions locales sont les « moins fortes », estime Jean-Philippe Dugoin-Clément, vice-président du Conseil régional d’Ile-de-France. Qui se retranche derrière l’avis du Conseil départemental d’Ile-de-France :  « L’option de la région c’est de suivre le Val-d’Oise car il est gestionnaire. Or le département nous dit qu’il y a un engorgement qui engendre des pollutions, confie Jean-Philippe Dugoin-Clément. Maintenant, il y a une enquête publique, et la réalité c’est qu’aucune porte n’est fermée. »

Risques d’asthme et de leucémie

Le département s’est montré peu loquace pour répondre aux critiques. Après de multiples mails et coups de téléphone, celui-ci finit par nous lâcher ces quelques maigres lignes, qui semblent indiquer un revirement : « Le Département a entamé de nouvelles discussions avec les communes et les agglomérations concernées par le projet afin de prendre toute la mesure des besoins actuels du territoire »

« Ils reprennent leur bâton de pèlerin pour essayer de convaincre, mais même s’ils amendent le projet en plantant des arbres, cela reste une deux fois deux voies, avec des dégâts énormes », dénonce Audrey Boehly. La pollution atmosphérique est responsable d’un décès sur dix en Ile-de-France.

 

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